Pour Gérard Haas, avocat au barreau de Paris, qui pratique le droit de l’internet depuis son émergence, il s’agit d’un droit de ruptures. Le droit des noms de domaine ou le régime de responsabilité des prestataires en sont des exemples frappants. Gérard Haas fait le point sur les avancées, les tendances et les questions émergentes comme la géolocalisation, la mobilité ou l’e-réputation. Il évoque avec nous les particularités de ce contentieux évolutif, pourtant très différent de celui de l’informatique, beaucoup plus technique et aux enjeux financiers d’une autre nature.
Sylvie Rozenfeld : Il y a tout juste dix ans, Monique Linglet vous a interviewé. A cette époque, votre cabinet avait déjà été créé. Pouvez-vous faire un bilan de cette dernière décade ?
Gérard Haas : Il y a dix ans, c’était les débuts du droit de l’internet. Beaucoup de changements sont intervenus depuis. Et le métier d’avocat a suivi cette évolution. Il y a dix ans, tout était encore à construire au niveau juridique. A cette époque, certains évoquaient encore le vide juridique de l’internet, alors qu’il fallait plutôt parler de poudrière juridique. Entre temps, le législateur est intervenu pour mettre en place un certain nombre de balises autour de la notion de confiance et de protection du consommateur, de responsabilité, etc. Parallèlement, nous nous sommes rendus compte que le développement du cabinet nécessitait de mettre en place des process, via la certification ISO.
Pourquoi ce besoin de mettre en place des process au sein du cabinet ?
Un cabinet d’avocats doit modéliser un certain nombre de manières de travailler. Nous recrutons régulièrement. C’est donc important de pouvoir présenter aux personnes nouvelles les bases sur lesquelles elles peuvent s’appuyer. Par ailleurs, les acteurs du web, des pures players comme les autres, avaient besoin d’avoir confiance. La norme ISO 9001 offre la possibilité de mettre en place des procédures qui permettent d’industrialiser l’approche. Nous en avons besoin.
Est-ce internet qui a suscité ce besoin d’industrialisation des pratiques de l’avocat ?
Pas seulement. Cela s’explique aussi par le fait qu’aujourd’hui la part de conseil devient de plus en plus importante dans la pratique du métier d’avocat et par la concurrence accrue entre cabinets. Nous avons mis en œuvre cette certification à partir de 2004. Et depuis, celle-ci a été régulièrement renouvelée. Elle nous a beaucoup apporté au niveau de l’organisation, du recrutement, de la formation, du développement, etc. Et elle nous a permis d’avoir une histoire, une culture d’entreprise. C’était d’autant plus important que nous intervenions dans un domaine où il y avait tout à faire. Nous pouvons donc dire que nous défendons et protégeons les acteurs de l’internet.
Qu’entendez-vous par l’intérêt d’avoir une histoire ? Cette certification vous permet-elle de tracer votre travail ?
Cela nous a permis d’organiser toute la vie du cabinet et de mettre en place des manières de fonctionner. Et comme dans le monde du numérique, où les acteurs ont l’habitude de travailler sur la base d’un cahier des charges, nous avons fait la même chose. Cette méthode est particulièrement adaptée lorsque l’on intervient dans le secteur des technologies de l’information. Beaucoup de cabinets spécialisés dans ce domaine sont certifiés ISO. Et ce n’est pas un hasard car il y a un besoin de se structurer et de rationaliser les coûts. Nous sommes sur un marché très compétitif, d’où la nécessité aussi d’avoir des indicateurs. J’ai assisté à l’e-G8 et j’ai retenu dans le discours d’Eric Schmidt, le patron de Google, la nécessité pour la nouvelle économie d’avoir des indicateurs qui nous permettent de prendre des mesures.
Et ce constat du patron de Google peut-il être transposé aux avocats du numérique ?
Parfaitement. Alain Bensoussan l’a démontré. Il a beaucoup innové en la matière. Les grands gourous de l’e-commerce considèrent que les avocats ont le seul métier qui ne peut pas intégrer un tel modèle de développement. Je pense que c’est faux. Tous ceux qui sont sur ce créneau depuis dix ans se sont adaptés. Il faut s’adapter, et tester et évoluer sans cesse.
Vous avez évoqué l’accroissement des consultations juridiques qui vous sont demandées.
C’est un deuxième changement important depuis dix ans. Aujourd’hui, le conseil représente 60% de notre activité contre 40% de contentieux. Des questions particulièrement innovantes sont posées, notamment parce que les entreprises mettent en place de nouveaux modèles économiques et elles veulent les sécuriser. Nous notons un glissement des demandes soumises. Il y a dix ans le questionnement tournait davantage autour de la propriété intellectuelle : marques, noms de domaine, protection des contenus, etc. Aujourd’hui, on nous interroge davantage sur le droit de la consommation, de la concurrence et de la distribution, de la protection des données à caractère personnel. Nous sommes sur des domaines transversaux qui évoluent vite.
Autre évolution majeure, nous sommes de plus en plus tournés vers l’international. Il y a dix ans, nos clients créaient des sites pour le marché français. Aujourd’hui, ils ont besoin de s’ouvrir à l’international. Nous travaillons beaucoup en français bien sûr, mais aussi en anglais, en allemand, en espagnol. Nous avons donc besoin de collaborateurs qui maîtrisent les langues étrangères. Nous travaillons également beaucoup avec des confrères étrangers. Nous accompagnons les Français qui s’adressent à un public étranger. Mais nous avons aussi des clients cybermarchands étrangers qui veulent pénétrer le marché français en adaptant leur modèle en France. Il faut donc parler leur langue pour comprendre leurs demandes.
Vous adaptez donc les demandes des sites étrangers qui ont une culture différente aux contraintes françaises.
On retrouve avec internet les problématiques de localisation, à savoir de mise en conformité de sites internet au regard des réglementations locales, d’implémentation dans la langue du pays, etc. C’est très intéressant mais cela reste encore un parcours du combattant. Certes, il y a des évolutions du droit communautaire pour tenter d’harmoniser les droits et de permettre les flux transfrontières.
Et pourquoi est-ce un parcours du combattant ?
Si l’Europe existe sur le papier, on s’aperçoit que ce n’est pas si simple lorsqu’on traverse les frontières. Il y a des différences en matière de logistique, de TVA, de langue, etc. Regardez, l’histoire des grands sites internet qui sont sur le marché européen est quand même semée d’échecs. Il est préférable de s’appuyer sur des avocats car la partie réglementaire est importante.
Aujourd’hui, nous nous intéressons beaucoup au droit luxembourgeois car de nombreux acteurs du web qui sont basés au Grand-Duché. Il est proche du droit français mais il n’a pas les mêmes règles, notamment en matière de notification et de responsabilité où le formalisme n’est pas le même. Si le site est localisé à l’étranger, il faut appliquer les règles locales, même chose pour les mentions légales ou la protection des données personnelles. Il faut donc travailler localement. Cela pose de vraies questions. En matière délictuelle, on a le choix de faire un constat en France pour plaider devant un tribunal français. Après il y a néanmoins l’exéquatur pour faire appliquer la décision à l’étranger. Dans ce cas, il convient de faire appel à un avocat local. Il faut donc connaître la législation d’un autre Etat qui se trouve quand même sur le territoire de l’Union européenne. Cela paraît bizarre mais chaque pays adapte les directives à son droit. Quant au consommateur français, il pourra toujours demander à bénéficier de la réglementation qui lui est la plus favorable. Mais en matière de diffamation, de propriété intellectuelle, de contenus illicites, il faut étudier le droit local.
Le métier d’avocat a changé, l’approche juridique aussi. Nous avions une approche transversale des problèmes, devions avoir des connaissances civiles, pénales, du droit commercial, etc. Aujourd’hui, il nous faut de bonnes connaissances à la fois du droit communautaire mais aussi de chaque règle locale où nos clients veulent s’installer. C’est la raison pour laquelle, nous concluons des partenariats avec des confrères localement. Nous sommes aidés par Gesica, le premier réseau international d’avocats francophones. Dans ce cadre, nous avons créé l’IP Business Club par lequel nous avons de l’information, de l’échange et une manière d’apprendre à travailler ensemble.
Et les contentieux, comment ont-ils évolué en dix ans ?
Aujourd’hui, on assiste à une augmentation du contentieux du droit de la consommation et de la concurrence. Je constate l’existence de nombreux litiges liés à la fin d’un contrat : rupture abusive, changement de plateforme, problématiques de migration, etc. Des situations que l’on rencontre souvent en matière de contrats informatiques. Mais à la différence du droit de l’informatique ou des télécoms où les contentieux sont complexes avec expertise et coûteux, les litiges de l’internet n’ont pas du tout cette dimension. Ils sont beaucoup plus nombreux mais les enjeux sont bien moins élevés. Et les expertises sont très rares car les problèmes techniques ne sont pas fréquents. Les contentieux de l’internet sont aussi plus courts que ceux de l’informatique. Il y a beaucoup de référés, même si la procédure est plus longue qu’avant, en raison probablement d’un encombrement des tribunaux. Le client a par ailleurs tendance à demander une assignation à jour fixe parce qu’il veut réduire les coûts. En matière de litiges de l’internet, nous faisons par ailleurs beaucoup appel à la procédure des requêtes de l’article 145 et aux constats. Je remarque que c’est un contentieux qui est devenu formaliste, avec par exemple les notifications de contenus illicites à l’hébergeur.
Il y a dix ans, l’avocat était spécialisé dans le droit des nouvelles technologies car il pensait que cela représentait une bonne opportunité pour sa carrière. Aujourd’hui, il faut être un « geek » pour éviter d’être hors course.
Quelles sont les problématiques juridiques que vous voyez émerger en ce moment ?
L’internet aujourd’hui se trouve dans notre poche. C’est l’internet mobile et tactile. Nos clients ont déjà anticipé le passage de l’informatique, du PC à la mobilité. Selon moi, le grand enjeu aujourd’hui est la géolocalisation. On note l’existence de gros projets de plateforme de géolocalisation. Toute l’économie basée sur le web est déjà dépassée. Avec les App, les micros applications, les besoins et les budgets sont également micros. Il faut donc toujours conserver un site internet car l’époque est au multi-canal : la boutique, le site web, les smartphones, etc.
On voit par ailleurs émerger une demande de valorisation des marques, des fichiers...
Est-ce là une activité juridique ?
Pas vraiment. Mais la valorisation inclut une partie juridique et s’appuie dessus. Il y a des questions nouvelles posées lors du dépôt de bilan d’une société qui édite un site internet : quid de la récupération des actifs immatériels tels que les noms de domaine, les fichiers. De nombreux dépôts de bilan interviennent dans les deux premières années de la création d’un site.
Et quels sont selon vous les contentieux émergents ?
Les questions émergentes aujourd’hui ne produisent pas encore des contentieux mais de la consultation juridique. Le contentieux vivant aujourd’hui porte sur les noms de domaine, les conflits avec les marques, la concurrence déloyale, etc. Les conflits sur l’e-réputation se multiplient. Cela concerne tout le monde : Monsieur tout le monde, un dirigeant d’entreprise, une personne morale...
On voit aussi apparaître de nouvelles affaires liées aux données personnelles. La Cnil nous donne une visibilité de sa doctrine grâce à la publication de ses délibérations sur son site internet. Chaque année, elle publie une feuille de route dans laquelle elle indique les secteurs ou domaines sur lesquels elle compte intervenir : la santé, les sociétés de recouvrement, par exemple.
Le commerce électronique est l’un de vos sujets de prédilection. Il est en partie réglementé par la LCEN, la loi pour la confiance dans l’économie numérique, qui est elle-même une transposition de la directive sur le commerce électronique. Elle avait été négociée et adoptée en un temps record grâce au consensus autour du fait qu’il fallait instaurer la confiance dans l’e-commerce pour qu’il se développe. Aujourd’hui, peut-on dire que le pari est tenu, que la confiance est instaurée ?
La question qui a occasionné le plus de débat autour de la confiance est la sécurité des paiements. Or, il s’agit d’un faux problème car les paiements sont sûrs. Le droit de la consommation et la protection des consommateurs étaient en revanche un terrain beaucoup plus incertain. La LCEN est arrivée à donner un cadre pour sécuriser les acteurs de l’internet, notamment par rapport à leur responsabilité. Les bases de la protection du consommateur ont été posées. Oui, on peut dire qu’on a réussi à instaurer la confiance dans le commerce électronique. Les statistiques nous en donnent une parfaite illustration. Les parts de marché sont importantes comme le nombre de Français qui achètent sur internet. Certes, il existe des litiges, mais ils sont faibles. L’objectif a été atteint. Mais il reste encore des zones de méfiance, comme celles des données personnelles. Il faut donner davantage d’assurance, notamment sur le droit à l’oubli. La nouvelle proposition de directive sur la protection des consommateurs permet aussi d’ajuster la réglementation.
Une nouvelle proposition de directive provoque une forte polémique parmi les e-marchands français. Ils semblent se réveiller bien tard. N’y a-t-il pas eu de consultations antérieures ?
Ils se sont réveillés au bon moment. Ils ont obtenu ce qu’ils désiraient. Aujourd’hui, nous avons une harmonisation sur le délai de rétractation qui sera de quatorze jours.
Les cybercommerçants français ne voulaient pas d’un délai si long, il me semble.
Oui, mais en fait les grands sites l’appliquaient déjà. In fine, le délai de quatorze jours calendaires va dans le sens du marché. Par ailleurs, des dérogations ont été accordées. Pour moi, ce n’est plus un point de blocage. De plus, le consommateur sera davantage protégé. La directive accorde le droit d’essayer le produit mais pas celui de le porter. Il sera responsable des dégradations survenues. Il est également prévu le remboursement du bien dans les quatorze jours. L’obligation de devoir livrer dans tous les Etats membres a par ailleurs été supprimée comme la prise en charge des frais de livraison quand le prix du bien dépassait 40€ ou sur les clauses abusives. Les grands acteurs du web français parlaient de bombes à retardement, aujourd’hui on peut parler d’un pétard mouillé.
Vous écrivez beaucoup sur l’e-réputation, vous proposez une prestation de veille. Pourquoi cet intérêt pour ce sujet ?
J’ai eu mes premières affaires en 2003. Elles portaient sur des personnes qui ne souhaitaient pas que leur nom soit référencé sur Google. A l’époque, nous avions saisi la Cnil en invoquant le droit à l’oubli. Nous avions tenté un certain nombre d’actions, notamment concernant la réédition de films « de charme » des années 70 avec des acteurs qui avaient tourné sous leur vrai nom et qui ne voulaient plus y être associés. Nous avons donc attrait en justice l’éditeur du DVD qui sortait une nouvelle compilation pour lui demander de ne plus faire apparaître les noms en question au générique afin qu’ils ne soient pas référencés sur les moteurs de recherche. Donc je me suis intéressé très tôt à l’e-réputation. Cela concernait d’abord la désindexation. Google ne se laissait pas mettre en cause, invoquant le fait qu’il n’y était pour rien, qu’il n’était qu’un simple agrégateur. Voyant que les solutions juridiques prenaient trop de temps et qu’elles étaient coûteuses, je me suis tourné vers la technique.
J’ai travaillé avec des agences de communication qui avaient des services spécialisés. Elles utilisaient, notamment, le référencement naturel pour faire reculer les liens qui étaient en première page. Et nous avons peaufiné certains outils qui, il y a cinq ans encore, étaient réservés aux grandes entreprises de type CAC 40. Au sein du cabinet, nous avons développé (paramétré) une solution qui s’appelle Lexatis. Cet outil est d’ailleurs en ligne. Il nous permet de faire une photographie de sites internet, après audit, de façon à pouvoir comparer s’il a été copié, utilisé, au niveau des fiches descriptives, des conditions générales d’utilisation, des mentions légales, des contenus, etc. Un autre logiciel, un crawler, fait un balayage de ce qui est écrit sur les réseaux sociaux, de façon négative ou positive au niveau de la réputation d’un client. Notre apport sera ensuite de qualifier juridiquement les faits constatés. On veille, on surveille et on voit quelle réponse donner. Cela peut bien sûr se traduire par des actions judiciaires, d’autant plus que sur les forums de discussion ou sur les réseaux sociaux les propos frôlent ou constituent des injures, de la diffamation, etc.
Vous avez donc procédé à une industrialisation de la veille sur internet.
Toutes les agences de communication le font. Mais aujourd’hui, nous apprenons à travailler ensemble.
Qu’entendez-vous précisément par le terme e-réputation ?
Selon moi, c’est l’image négative ou positive de l’entreprise ou d’une personne sur internet. Ce sont tous les propos ou écrits sur une personne physique ou morale. Sur les réseaux sociaux, il y a un côté pile et un côté face. Par exemple, les marques veulent être présentes sur les réseaux sociaux. Elles considèrent que c’est important pour la visibilité de leurs produits. Mais sur ces sites qui sont des zones de liberté, où les internautes s’expriment pour leurs amis, voire les amis de leurs amis, tout va très vite.
Pour nous, il s’agit d’un vrai marché avec de nombreuses demandes de nos clients. Parfois, ce sont des personnes atteintes dans leur couple, leur travail, etc. Ce sont des dossiers lourds, compliqués.
Votre thèse portait sur « la réservation de l’œuvre multimédia ». Vous vous étiez attaché à la qualifier. A l’époque, vous envisagiez un statut sui generis, proche de l’œuvre collective. Cette question reste d’actualité. Le secteur du jeu vidéo est en quête de certitude en la matière et milite auprès du gouvernement pour clarifier la question. Après l’échec du CSPLA pour aboutir à un consensus, François Fillon a confié une mission au député Patrice Martin-Lalande sur cette question. S’il vous auditionnait, quelles solutions lui proposeriez-vous ?
Je lui dirais qu’aujourd’hui il y a un vrai besoin de qualification. La France a beaucoup de talents exceptionnels. Or, si nous voulons une industrie du jeu vidéo, il faut qu’elle puisse bénéficier des moyens de protection. Le régime du jeu vidéo est bancal. L’œuvre collective est la qualification qui lui conviendrait le mieux mais c’est un régime dérogatoire, donc une exception, qui peut toujours être requalifiée par un juge. Le principe est l’œuvre de collaboration, avec des rémunérations proportionnelles. Dans le cas d’une œuvre collective, les droits appartiennent à la personne morale qui l’édite. Toutes les personnes contribuent à l’œuvre pour le compte de la personne morale, la rémunération peut être forfaitaire. Cela présente de gros avantages. Je pense que le jeu vidéo, ce n’est pas une œuvre audiovisuelle.
Et la loi « Hadopi », qu’en pensez-vous ?
Cette coupure de l’abonnement à internet pose un vrai problème. Je suis très gêné, comme je le suis sur la question du filtrage. Je suis soucieux du respect des libertés. Il faut se demander si ceux qu’on veut protéger sont véritablement en danger. Je pense que le web s’est développé d’une manière extraordinaire avec une mise en place d’une véritable économie. Parallèlement, on a favorisé la liberté d’expression et de création, ainsi que le dialogue entre les individus. Ce serait dommage de briser cette dynamique pour privilégier une vision qui ne fait pas partie de notre avenir. Je suis d’accord pour un internet responsable, mature mais arrêtons de vouloir couper les accès à internet, à vouloir bloquer, filtrer. Et s’il y a autant de pirates, cela s’explique par les défaillances de l’éducation. Peut-être qu’avant de sanctionner, il faudrait éduquer et favoriser la formation aux nouvelles technologies.
Internet, c’est passionnant. Nous avons un univers en constante évolution auquel on doit s’adapter. Avec le web, nous ne sommes pas dans des tendances mais dans des ruptures. Par exemple, le nom de domaine a été une vraie rupture, un objet jusqu’alors inconnu du code de la propriété intellectuelle, un nouveau signe distinctif. Le régime de responsabilité des acteurs de l’internet a constitué une autre zone de rupture, comme les réseaux sociaux. Le droit de l’internet est un droit de rupture que l’on essaie de réguler.
Propos recueillis par Sylvie Rozenfeld