Qui eut cru qu’une commission mixte paritaire (CMP) échouerait sur un sujet, a priori, peu politique comme la protection des données personnelles ! Pas grand-monde, y compris nous qui avions prévu une interview sur la nouvelle loi, à paraître dans ce numéro. Cela fait plutôt mauvais genre quand le pays, qui se targue d’être une locomotive en la matière, n’est pas prêt pour l’échéance du 25 mai 2018, que chacun connaît désormais comme la date de l’application du RGPD. La présidente de la Cnil, Isabelle Falque-Pierrotin, s’est déclarée très préoccupée par le retard occasionné par l’échec de la CMP. La France risque d’être handicapée, si des cas interétatiques surviennent rapidement.
Sans précédent sur ce sujet, les députés et sénateurs n’ont pas réussi à s’entendre. Ces derniers avaient introduit certains amendements substantiels au texte adopté par les députés. Mais les deux chambres ne sont pas parvenues à un accord sur un texte commun lors de la commission mixte paritaire du 6 avril. Dans un contexte polémique sur la réforme institutionnelle à venir, les sénateurs ont été très fâchés, dénonçant la rigidité des députés. Lors de la seconde discussion, le 19 avril dernier, les sénateurs ont maintenu, peu ou prou, leur version et ils l’ont unanimement votée, les parlementaires LREM et communistes s’étant abstenus. Les deux camps sont notamment en désaccord sur l’action de groupe, la création d’une dotation spécifique et l’exonération de toute sanction pour les collectivités locales, le fléchage des amendes et astreintes, l’ouverture des décisions de justice ou l’âge minimal de consentement des mineurs pour un traitement.
Si tout se déroule comme prévu, nous devrions cependant tenir le délai fixé par le règlement puisque l’adoption définitive par l’Assemblée nationale est prévue à la mi-mai, les députés ayant le dernier mot – nous avons d’ailleurs d’ores et déjà pris rendez-vous pour une interview à paraître dans le numéro de juin – Les sénateurs, qui se sont sentis méprisés par les députés de la nouvelle majorité lors de la CMP, peuvent très bien jouer les trouble-fêtes en déférant le texte devant le Conseil constitutionnel, comme certains d’entre eux ont promis de le faire. Le recours, qui pourrait porter sur la transparence des algorithmes ou les fichiers pénaux, empêcherait la France d’être dotée d’une loi compatible au 25 mai. A moins que le gouvernement déclare l’urgence obligeant le conseil des sages à se prononcer sous huitaine.